Bonjour,
et bienvenue chez moi, à Bamako
Arrivé dans la capitale malienne depuis
une dizaine de jours, il est temps de donner
des nouvelles de ce voyage en spiruline, mais
aussi de cette ville où il n'y a pas
que des dimanches...
Premières journées abasourdissantes,
écrasantes, vraiment pénibles.
Impression de chaos du à cette multitude,
un peu à l'Indienne ; mélange
de population, ville de refugiés, tumeur
humaine sans mesure, agitation, soif de vivre,
profusion de couleurs, odeurs répugnantes
et délicieuses, visages souriants, hautains,
dignes, musiques blues, Salif Keita et Ali farka
Toure entre autres. Un énorme sèche-cheveux
constamment en position max, au-dessus de la
ville brasse avec conscience la poussière
des ruelles en latérite et les gaz d'échappement
des milliers de mobylettes, de sotraba, et autres
engins aux moteurs déréglés
qui dégurgitent comme ils peuvent l'essence
frelatée qui les nourrit.
Température, 30° le matin, et 40/43°
l'aprem. Je bois 5/6l d'eau par jour et j'en
pisse 20cc. " Qu'est ce que je fais là
? " question fondamentale de Chatwin,
Prince du Voyage. Et moi plus particulièrement
dans cet univers où personne ne m'attendait
si ce n'est au tournant. Je suis sur la trace
de la spiruline depuis un an : tout apprendre
de cette merveilleuse cyanobactérie,
de trois milliard d'années qui avec ses
petites surs a passé tout ce temps
à créer l atmosphère de
la terre, nourriture du flamand rose, elle est
cultivée pour ses énormes richesses
nutritives et ses pouvoirs de stimulation des
défenses immunitaires (VIH et cancer).
Après une petite semaine de session
de découverte à Hyères
cet automne, j'ai espéré un stage
de formation de trois mois qui est devenu assez
hypothétoc.
Une ONG française Antenna
a fait sa spécialité de l'installation
et du suivi de ferme de production dans la zone
sahélienne de l'Afrique, et en fin février,
un rv avec son directeur technique m'a convaincu
d'accepter une mission de trois mois au Mali,
ce qui correspondait bien à mon projet
: apprendre la culture de la spiruline, la gestion
de sa production, ses effets sur les populations
malnutries, les circuits de distribution, et
réunir suffisamment d'éléments
pour pouvoir établir ou non un projet
personnel autour de cette nouvelle copine. Superbe
opportunité
Alors j'ai décidé de mettre les
mains dedans, et d'accepter cette mission. Il
faut dire aussi qu'il y a un mois, la ferme
de Prat Foucaud, vendue, vivait les dernières
heures de ma férule,lors d'une dernière
grande fête, sous les auspices énigmatiques
d'une grandiose éclipse de pleine lune.
Déchirement douloureux qui ne pouvait
être sublimé que par une intensité
aussi forte ;et ici, je ne suis pas déçu.
Une page s'est tournée, fruit des amours
entre une lente maturation et un destin qui
ne se révèle que lors de son accomplissement.
Bref me voilà dans la fournaise africaine
et sûrement dans le fil de ma vie. Danger
d'avancer, de reculer, de rester statique
La miséricorde, cette délicieuse
et compassionnelle accompagnatrice de ma vie,
m'a souri une fois encore : merveilleuse surprise
si attendue
Et après m'être
morfondu, seul, (Stocked Inside Bamako With
The Memphis Blues Again), la porte s'est ouverte,
et me voilà en un coup de baguette magique, hébergé dans une
jolie villa, noyée sous les manguiers,
par un ami, de ceux que l'on reconnaît
immédiatement comme de toujours... connivence,
et humour
Et d'un coup Bamako me sourit et m'accueille.
Déjà un peu tropicalisé,
j'accepte les conditions et j'y trouve goût.
Levé très tôt, six heure,
à la fraîche, le p'tit dej sur
la terrasse, et ces 20 Km sur les pistes, en
moto dans les collines, pour rejoindre le village,
Safo, où se trouve la ferme.
Le serpent lumineux fuit mes péteradades
et je vois s'envoler des oiseaux dont je n'imaginais
pas l'existence. Le paysage est brulé,
de la sécheresse, arbres coupés
aussi, pour alimenter les besoins de la capitale.
Odeur de garrigue, écrasée par
le soleil.
Petites fermes d'élevage, des anes,
et les pietons sur le chemin, écolier,
femmes chargées de ballots d'herbes séchées,
de jarres, et ces énormes bottes de joncs
sur les bicyclettes en équilibre instable...des
sourires et des petits signes de bienvenu...
A la ferme,récolte, soins et attentions
à la spiruline dans ses bassins, équipe
débonnaire, d'une grande gentillesse,
les visites aux intervenants, le temps tellement
plus lent et aléatoire et les moqueries
pleines de rire pour le toubab, qui sue et expurge
son étrangeté.
J'apprends et j'essaie d'apporter un peu de
ce que je sais.
La matinée finit avec ce sandwich à
la spiruline fraîche qui réunit
l'équipe de production. Retour à
Bko vers une heure, attendu par Philippe et
sa cuisinière Salomé, pour un
crumble aux mangues ou un poulet arachide et
la sieste avec un petit coup de clim.
Voilà le temps qui passe pour moi à
apprendre, une fois encore, le tout et le rien.
Ah, çà y est, je me connecte avec
mon skype pour entendre les délicieux
gazouillis de ma petite Suzanne et l'attention
de sa maman. Je les espère vers la mi-mai
pour visiter les villes magiques de Ségou,
Djenné et Bandiagara et contempler le
fleuve, le grand Niger qui remonte si haut irriguant dans une arborescence incroyablement fertile le sahel, pour se glisser en un mince cours d'eau à travers les sables du
grand Sahara.
Et de même me suive.
Chaudes embrassades bamalkiennes
Jean-François